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Aperçu et analyse sur la «dirigeance(1)» du secteur public marchand algérien



Aperçu et analyse sur la «dirigeance(1)» du secteur public marchand algérien
Par Rachid Tridi
Consultant en management d'entreprise et droit social
Cette contribution, qui se voudrait pragmatique, assise sur les observations d'un praticien du management, loin de toute théorie de salon, ambitionne d'apporter quelques éléments d'analyse, susceptibles d'ouvrir le débat et d'éclairer les prochaines réformes du nouveau département ministériel de l'Industrie et des Mines, qui a commencé, semble-t-il, à faire bouger les lignes.

Péripétie du secteur public marchand

Une incursion dans l'histoire du secteur public marchand révèle que ce dernier a toujours été ballotté, depuis l'avènement des fonds de participation en 1991, au gré des options économiques retenues, avec des dénominations diverses, et a été constamment soumis à des expérimentations et autres exigences de la part des dirigeants politiques du moment.
Les changements en matière d'organisation des filières publiques depuis les fonds de participation, qui restent, quand même, les seuls à avoir lancé les premiers jalons d'une vision éclairée très vite écourtée, en passant par les holdings, les méga-holdings et autres SGP, jusqu'à aboutir aux actuels groupes, ne se sont limités qu'à opérer des restructurations de formes et des changements de périmètres (fusions-absorptions-dissolutions avec ou sans liquidations) des EPE, sans apporter des solutions pratiques aux problèmes du secteur public économique algérien, lors de ses différentes péripéties vers le développement.
Le secteur public marchand affilié aux services de la chefferie du gouvernement du temps des fonds de participation et des holdings voulait affirmer le désengagement de l'Etat en affranchissant les EPE de toute forme de tutelle, par une autonomie d'action soumise aux lois du marché.

Cette option a vite été délaissée par leur rattachement, à partir de 2010, aux différents ministères d'ancrage, consacrant ainsi une remise sous tutelle des ex-SGP et groupes industriels actuels.

L'organisation des filières, mises en place depuis plus de vingt ans, a démontré, en outre, une non-assimilation des fonctions managériales et une absence de vision sur les fonctions stratégiques (fonction industrielle et fonction de participation). L'absence de bilans de réalisation et de fonctionnement des organes de gestion, à ce jour, n'a permis d'évaluer ni les performances ni les contre-performances des ex-SGP et groupes industriels qui leur ont succédé afin de s'assurer de leur bonne gouvernance, de situer les mérites et les responsabilités, et d'identifier les contraintes et autres facteurs dirimants dans l'accomplissement de leurs missions.Il est à reconnaître que dans un contexte de surenchère de réformes, les multiples réformes du secteur public marchand n'ont véritablement jamais obéi à une logique purement industrielle tant les interférences politiques et les choix économiques non judicieux (filialisation, ouverture de capital, prise de participation, restructuration, etc.), éclairés par des théoriciens qui n'ont jamais connu le terrain de la pratique, y étaient la règle (application de «recettes» importées, nominations clientélistes des directoires et dirigeants d'entreprises sans évaluation de profils, suivis d'injonctions administratives et autres ingérences dans la gestion) y sont quasiment omniprésentes, créant en cela un amas d'imperfections, de tâtonnements, d'erreurs de trajectoires et d'incongruités organisationnelles. La gestion des capitaux marchands de l'Etat, confiée à des non initiés, a fini ainsi par subir le coup de grâce en s'amenuisant et en s'anéantissant d'elle-même durant les cinq dernières années, pour rester immobilisée dans l'angle mort du ministère de l'Industrie et des mines.

Constats liés à l'organisation

La situation des filières publiques, en dépit des actions d'assainissement et de restructuration, a accusé le poids des retards dans la réalisation des programmes d'investissements et dans les mutations qualitatives nécessaires au développement de leurs compétitivités. L'absence de plans organisationnels adaptés aux différentes structures d'encadrement des capitaux marchands de l'Etat, tant au niveau central qu'au niveau des groupes, a constitué un frein aux actions planifiées dans les différents plans stratégiques élaborées par des bureaux d'études nationaux et étrangers. Elles connaissent une tendance à la stagnation, si ce n'est une régression pure et simple.

Ainsi, les conséquences de plans organisationnels incomplets proposés aux groupes ont été davantage ressenties comme une contrainte par les personnes responsables de leur mise en ?uvre. Lorsque le plan relatif aux ressources humaines ne correspond pas tout à fait au plan stratégique proposé, chacun doit supporter une charge additionnelle de travail ou de tâches non pertinentes qui vont certainement dévier des objectifs tracés. La situation devient une source de frustration et de stress, car l'organisation n'arrivera pas à aller de l'avant.

Constats liés aux Ressources humaines

Le capital humain a été totalement négligé et les choix des dirigeants n'étaient nullement assis sur la notion de compétence. Beaucoup de cadres de valeur ont été démis de leurs fonctions pour avoir obtempéré à des injonctions non fondées légalement, si ce n'est par pure incompatibilité d'humeur pour être remplacés par des profanes en management, corvéables à merci, ou ayant de piètres résultats à leur actif.
La dimension humaine représente une des plus importantes causes de réussite ou d'échec dans l'implantation de stratégies et de systèmes sains et solides de gestion d'une entreprise. Il est important, par conséquent, d'insister sur le besoin et la nécessité de développer les ressources humaines au sein de ces groupes industriels et leurs filiales suivant une logique de formation et d'évaluation à travers des concours et appels à candidatures, loin de toute désignation clientéliste, sur la base de critères objectifs et de la méritocratie.

Il reste à déplorer quand même une action financée par le ministère de l'Industrie, de la PME et de la Promotion des investissements, qui avait été initiée le 16/09/2010 par la note n°905/SG/10 pour la constitution d'un vivier national de managers, mais dont l'issue n'a jamais vu le jour. Les résultats de cette opération d'évaluation confiée à un bureau d'études algérien, qui avait traité des centaines de candidatures, n'ont jamais été mis à profit, en dépit du budget qui lui a été alloué, sur financement du Trésor public

Constats sur le cadre de la gouvernance

Les contraintes pesantes de l'environnement de l'entreprise publique algérienne constituent à bien des égards des freins à l'éclosion de l'initiative et de l'innovation et sont sources de blocage à son essor et à son développement.
Cet environnement ressenti par tous les gestionnaires du terrain se caractérise plus particulièrement par :
? Un cadre de gouvernance qui mérite d'être repensé en profondeur, aux limites mouvantes, qui rend difficile toute projection de l'entreprise dans l'avenir.
? Une restructuration de l'appareil économique, toujours inachevée, qui a souvent donné naissance à des institutions dont les missions et rôles se sont souvent entremêlés.
? Les restructurations, accompagnées de périodes transitoires qui durent, sont vécues dans un contexte flou qui permet la résurgence des anciens réflexes faits de décisions unilatérales et d'injonctions administratives.
? Des désignations d'administrateurs, n'ayant aucune notion de management des EPE, dont la plupart sont des fonctionnaires n'ayant aucune pratique des fonctions vitales de l'entreprise, entravant par leur présence toute forme de dynamisme et d'initiative dans la gestion libre et autonome des EPE.
? Un climat général délétère et suspicieux très pesant sur la gestion quotidienne, qui freine les initiatives et contraint l'entreprise à opérer des choix optionnels les plus «sécurisants» souvent au détriment d'options plus performantes.
? Le bilan des réalisations des ex-SGP et actuels groupes industriels, en termes de retour d'investissement, n'a jamais été réalisé à titre de suivi périodique et d'évaluation.
Toutes ces contraintes liées à l'environnement ont impacté la dynamique généralement reconnue aux groupes industriels et continuent de peser davantage sur ses performances de gestion.

Contraintes et insuffisances ayant marqué le fonctionnement des groupes

La montée en puissance de la fonction industrielle au sein des nouveaux groupes, suite au passage du modèle SGP au modèle groupe, a été handicapée par le manque d'outils de gestion et des compétences pour les fonctions-clés (développement, exploitation & production, management & ressources humaines).
L'absence de repères et de références (inexistence de standards propres aux groupes), guides de gestion de l'exploitation (ratios de production et de consommation, taux de fiabilité des installations...) et des investissements (exigences standard, modèles types de cahiers des charges et de contrats), donne lieu à des approches disparates entre les diverses EPE affiliées aux différents groupes industriels.

La gestion opérationnelle des participations minoritaires, qui a échappé totalement aux contrôles des groupes industriels et de l'Etat, laissant à ce jour libre cours aux partenaires étrangers de dicter leurs volontés, en maximisant les charges et minimisant les profits pour la partie algérienne. Il y a lieu d'instaurer, à ce titre, une structure centrale au sein des nouveaux groupes industriels ou l'institution d'une agence relevant du ministère des Finances, qui se chargerait de la gestion des participations minoritaires dans les partenariats étrangers et du contrôle des autres participations de l'Etat et autres formes de transactions.
Ces constats de faiblesse sur l'organisation des groupes industriels, qui constitue la preuve éclatante de leur échec, ont été davantage exacerbés par :

? un défaut de vision prospective de la part des managers ;
? un code du travail à moderniser et à assouplir ;
? un contexte réglementaire défavorable marqué par une profusion de textes (procédures de passation des marchés qui restent à flexibiliser, nouveau système financier et comptable, lourd et toujours mal assimilé).

Défis à relever et enseignements sur les échecs

Les filières publiques doivent, promouvoir une vision stratégique «concertée avec tous les acteurs de la sphère économique, tant publics que privés, appuyée par des études d'expertise de «faisabilité» de haute facture, servant de référents aux décisions à prendre dans la reconfiguration du secteur public marchand.
La concertation en intra-filières devrait également dominer la démarche à même de canaliser les efforts, mutualiser et mobiliser leurs ressources, et instaurer une dynamique de compétitivité permettant d'assurer la réussite des schémas à préconiser.
Pour capter les vraies compétences et constituer un vivier en ce sens, il est important de procéder à des concours périodiques pour le recrutement des compétences et de créer une Bourse d'emploi de managers, et de limiter la durée des contrats des cadres dirigeants dans les EPE à un mouvement cyclique de quatre (04) années tournantes, pour éviter l'enracinement des dirigeants, facteur de contre-productivité.

Pour une efficience de fonctionnement et une réactivité de management, il y a lieu de définir des organigrammes-types pour les groupes industriels, quitte à les faire évoluer en fonction de leur envergure et des missions à leur adjoindre. Le suivi des transactions minoritaires, le contrôle opérationnel et la surveillance stratégique doivent être également réhabilités vis-à-vis des filiales et des participations accordées aux partenaires étrangers pour garantir l'exécution de l'ensemble des engagements souscrits et préserver les intérêts publics de l'Etat.
Le tout restant reste tributaire de quatre éléments fondamentaux requis pour créer les conditions de réussite à l'implantation d'une telle stratégie :

? un cadre de gouvernance lisible et transparent ;
? un contrat social fort, avec l'implication de tous les acteurs concernés par la sphère économique ;
? une organisation performante et évolutive ;
? une ressource humaine compétente constamment entretenue par une formation continue et assise sur le seul critère de la méritocratie.
Les acteurs économiques des capitaux marchands de l'Etat doivent acquérir une meilleure compréhension du management, réadapter et évaluer la mise en ?uvre des plans stratégiques déjà élaborés qui leur ont été confiés, et surtout attirer et former les talents qui sauront, à leur tour, relever les défis et endosser leur rôle d'acteur de changement en ces périodes de chocs externes. R. T.

1)- Le terme «dirigeance» est un néologisme emprunté au vocabulaire de la sociologie du travail. Il désigne ce qui touche à la direction d'une organisation. La dirigeance, selon Roland Janvier, chercheur en sciences de l'information (Finistère), est l'art de traduire un projet en cap opérationnel à suivre et en objectif d'actions à atteindre.

Cette contribution, qui se voudrait pragmatique, assise sur les observations d'un praticien du management, loin de toute théorie de salon, ambitionne d'apporter quelques éléments d'analyse, susceptibles d'ouvrir le débat et d'éclairer les prochaines réformes du nouveau département ministériel de l'Industrie et des Mines, qui a commencé, semble-t-il, à faire bouger les lignes.

Péripétie du secteur public marchand
Une incursion dans l'histoire du secteur public marchand révèle que ce dernier a toujours été ballotté, depuis l'avènement des fonds de participation en 1991, au gré des options économiques retenues, avec des dénominations diverses, et a été constamment soumis à des expérimentations et autres exigences de la part des dirigeants politiques du moment.
Les changements en matière d'organisation des filières publiques depuis les fonds de participation, qui restent, quand même, les seuls à avoir lancé les premiers jalons d'une vision éclairée très vite écourtée, en passant par les holdings, les méga-holdings et autres SGP, jusqu'à aboutir aux actuels groupes, ne se sont limités qu'à opérer des restructurations de formes et des changements de périmètres (fusions-absorptions-dissolutions avec ou sans liquidations) des EPE, sans apporter des solutions pratiques aux problèmes du secteur public économique algérien, lors de ses différentes péripéties vers le développement.
Le secteur public marchand affilié aux services de la chefferie du gouvernement du temps des fonds de participation et des holdings voulait affirmer le désengagement de l'Etat en affranchissant les EPE de toute forme de tutelle, par une autonomie d'action soumise aux lois du marché.
Cette option a vite été délaissée par leur rattachement, à partir de 2010, aux différents ministères d'ancrage, consacrant ainsi une remise sous tutelle des ex-SGP et groupes industriels actuels.
L'organisation des filières, mises en place depuis plus de vingt ans, a démontré, en outre, une non-assimilation des fonctions managériales et une absence de vision sur les fonctions stratégiques (fonction industrielle et fonction de participation). L'absence de bilans de réalisation et de fonctionnement des organes de gestion, à ce jour, n'a permis d'évaluer ni les performances ni les contre-performances des ex-SGP et groupes industriels qui leur ont succédé afin de s'assurer de leur bonne gouvernance, de situer les mérites et les responsabilités, et d'identifier les contraintes et autres facteurs dirimants dans l'accomplissement de leurs missions.Il est à reconnaître que dans un contexte de surenchère de réformes, les multiples réformes du secteur public marchand n'ont véritablement jamais obéi à une logique purement industrielle tant les interférences politiques et les choix économiques non judicieux (filialisation, ouverture de capital, prise de participation, restructuration, etc.), éclairés par des théoriciens qui n'ont jamais connu le terrain de la pratique, y étaient la règle (application de «recettes» importées, nominations clientélistes des directoires et dirigeants d'entreprises sans évaluation de profils, suivis d'injonctions administratives et autres ingérences dans la gestion) y sont quasiment omniprésentes, créant en cela un amas d'imperfections, de tâtonnements, d'erreurs de trajectoires et d'incongruités organisationnelles. La gestion des capitaux marchands de l'Etat, confiée à des non initiés, a fini ainsi par subir le coup de grâce en s'amenuisant et en s'anéantissant d'elle-même durant les cinq dernières années, pour rester immobilisée dans l'angle mort du ministère de l'Industrie et des mines.

Constats liés à l'organisation
La situation des filières publiques, en dépit des actions d'assainissement et de restructuration, a accusé le poids des retards dans la réalisation des programmes d'investissements et dans les mutations qualitatives nécessaires au développement de leurs compétitivités. L'absence de plans organisationnels adaptés aux différentes structures d'encadrement des capitaux marchands de l'Etat, tant au niveau central qu'au niveau des groupes, a constitué un frein aux actions planifiées dans les différents plans stratégiques élaborées par des bureaux d'études nationaux et étrangers. Elles connaissent une tendance à la stagnation, si ce n'est une régression pure et simple.
Ainsi, les conséquences de plans organisationnels incomplets proposés aux groupes ont été davantage ressenties comme une contrainte par les personnes responsables de leur mise en ?uvre. Lorsque le plan relatif aux ressources humaines ne correspond pas tout à fait au plan stratégique proposé, chacun doit supporter une charge additionnelle de travail ou de tâches non pertinentes qui vont certainement dévier des objectifs tracés. La situation devient une source de frustration et de stress, car l'organisation n'arrivera pas à aller de l'avant.

Constats liés aux Ressources humaines
Le capital humain a été totalement négligé et les choix des dirigeants n'étaient nullement assis sur la notion de compétence. Beaucoup de cadres de valeur ont été démis de leurs fonctions pour avoir obtempéré à des injonctions non fondées légalement, si ce n'est par pure incompatibilité d'humeur pour être remplacés par des profanes en management, corvéables à merci, ou ayant de piètres résultats à leur actif.
La dimension humaine représente une des plus importantes causes de réussite ou d'échec dans l'implantation de stratégies et de systèmes sains et solides de gestion d'une entreprise. Il est important, par conséquent, d'insister sur le besoin et la nécessité de développer les ressources humaines au sein de ces groupes industriels et leurs filiales suivant une logique de formation et d'évaluation à travers des concours et appels à candidatures, loin de toute désignation clientéliste, sur la base de critères objectifs et de la méritocratie.
Il reste à déplorer quand même une action financée par le ministère de l'Industrie, de la PME et de la Promotion des investissements, qui avait été initiée le 16/09/2010 par la note n°905/SG/10 pour la constitution d'un vivier national de managers, mais dont l'issue n'a jamais vu le jour. Les résultats de cette opération d'évaluation confiée à un bureau d'études algérien, qui avait traité des centaines de candidatures, n'ont jamais été mis à profit, en dépit du budget qui lui a été alloué, sur financement du Trésor public

Constats sur le cadre de la gouvernance
Les contraintes pesantes de l'environnement de l'entreprise publique algérienne constituent à bien des égards des freins à l'éclosion de l'initiative et de l'innovation et sont sources de blocage à son essor et à son développement.
Cet environnement ressenti par tous les gestionnaires du terrain se caractérise plus particulièrement par :
? Un cadre de gouvernance qui mérite d'être repensé en profondeur, aux limites mouvantes, qui rend difficile toute projection de l'entreprise dans l'avenir.
? Une restructuration de l'appareil économique, toujours inachevée, qui a souvent donné naissance à des institutions dont les missions et rôles se sont souvent entremêlés.
? Les restructurations, accompagnées de périodes transitoires qui durent, sont vécues dans un contexte flou qui permet la résurgence des anciens réflexes faits de décisions unilatérales et d'injonctions administratives.
? Des désignations d'administrateurs, n'ayant aucune notion de management des EPE, dont la plupart sont des fonctionnaires n'ayant aucune pratique des fonctions vitales de l'entreprise, entravant par leur présence toute forme de dynamisme et d'initiative dans la gestion libre et autonome des EPE.
? Un climat général délétère et suspicieux très pesant sur la gestion quotidienne, qui freine les initiatives et contraint l'entreprise à opérer des choix optionnels les plus «sécurisants» souvent au détriment d'options plus performantes.
? Le bilan des réalisations des ex-SGP et actuels groupes industriels, en termes de retour d'investissement, n'a jamais été réalisé à titre de suivi périodique et d'évaluation.
Toutes ces contraintes liées à l'environnement ont impacté la dynamique généralement reconnue aux groupes industriels et continuent de peser davantage sur ses performances de gestion.

Contraintes et insuffisances ayant marqué le fonctionnement des groupes
La montée en puissance de la fonction industrielle au sein des nouveaux groupes, suite au passage du modèle SGP au modèle groupe, a été handicapée par le manque d'outils de gestion et des compétences pour les fonctions-clés (développement, exploitation & production, management & ressources humaines).
L'absence de repères et de références (inexistence de standards propres aux groupes), guides de gestion de l'exploitation (ratios de production et de consommation, taux de fiabilité des installations...) et des investissements (exigences standard, modèles types de cahiers des charges et de contrats), donne lieu à des approches disparates entre les diverses EPE affiliées aux différents groupes industriels.
La gestion opérationnelle des participations minoritaires, qui a échappé totalement aux contrôles des groupes industriels et de l'Etat, laissant à ce jour libre cours aux partenaires étrangers de dicter leurs volontés, en maximisant les charges et minimisant les profits pour la partie algérienne. Il y a lieu d'instaurer, à ce titre, une structure centrale au sein des nouveaux groupes industriels ou l'institution d'une agence relevant du ministère des Finances, qui se chargerait de la gestion des participations minoritaires dans les partenariats étrangers et du contrôle des autres participations de l'Etat et autres formes de transactions.
Ces constats de faiblesse sur l'organisation des groupes industriels, qui constitue la preuve éclatante de leur échec, ont été davantage exacerbés par :
? un défaut de vision prospective de la part des managers ;
? un code du travail à moderniser et à assouplir ;
? un contexte réglementaire défavorable marqué par une profusion de textes (procédures de passation des marchés qui restent à flexibiliser, nouveau système financier et comptable, lourd et toujours mal assimilé).

Défis à relever et enseignements sur les échecs
Les filières publiques doivent, promouvoir une vision stratégique «concertée avec tous les acteurs de la sphère économique, tant publics que privés, appuyée par des études d'expertise de «faisabilité» de haute facture, servant de référents aux décisions à prendre dans la reconfiguration du secteur public marchand.
La concertation en intra-filières devrait également dominer la démarche à même de canaliser les efforts, mutualiser et mobiliser leurs ressources, et instaurer une dynamique de compétitivité permettant d'assurer la réussite des schémas à préconiser.
Pour capter les vraies compétences et constituer un vivier en ce sens, il est important de procéder à des concours périodiques pour le recrutement des compétences et de créer une Bourse d'emploi de managers, et de limiter la durée des contrats des cadres dirigeants dans les EPE à un mouvement cyclique de quatre (04) années tournantes, pour éviter l'enracinement des dirigeants, facteur de contre-productivité.
Pour une efficience de fonctionnement et une réactivité de management, il y a lieu de définir des organigrammes-types pour les groupes industriels, quitte à les faire évoluer en fonction de leur envergure et des missions à leur adjoindre. Le suivi des transactions minoritaires, le contrôle opérationnel et la surveillance stratégique doivent être également réhabilités vis-à-vis des filiales et des participations accordées aux partenaires étrangers pour garantir l'exécution de l'ensemble des engagements souscrits et préserver les intérêts publics de l'Etat.
Le tout restant reste tributaire de quatre éléments fondamentaux requis pour créer les conditions de réussite à l'implantation d'une telle stratégie :
? un cadre de gouvernance lisible et transparent ;
? un contrat social fort, avec l'implication de tous les acteurs concernés par la sphère économique ;
? une organisation performante et évolutive ;
? une ressource humaine compétente constamment entretenue par une formation continue et assise sur le seul critère de la méritocratie.
Les acteurs économiques des capitaux marchands de l'Etat doivent acquérir une meilleure compréhension du management, réadapter et évaluer la mise en ?uvre des plans stratégiques déjà élaborés qui leur ont été confiés, et surtout attirer et former les talents qui sauront, à leur tour, relever les défis et endosser leur rôle d'acteur de changement en ces périodes de chocs externes. R. T.

1)- Le terme «dirigeance» est un néologisme emprunté au vocabulaire de la sociologie du travail. Il désigne ce qui touche à la direction d'une organisation. La dirigeance, selon Roland Janvier, chercheur en sciences de l'information (Finistère), est l'art de traduire un projet en cap opérationnel à suivre et en objectif d'actions à atteindre.

Cette contribution, qui se voudrait pragmatique, assise sur les observations d'un praticien du management, loin de toute théorie de salon, ambitionne d'apporter quelques éléments d'analyse, susceptibles d'ouvrir le débat et d'éclairer les prochaines réformes du nouveau département ministériel de l'Industrie et des Mines, qui a commencé, semble-t-il, à faire bouger les lignes.

Péripétie du secteur public marchand
Une incursion dans l'histoire du secteur public marchand révèle que ce dernier a toujours été ballotté, depuis l'avènement des fonds de participation en 1991, au gré des options économiques retenues, avec des dénominations diverses, et a été constamment soumis à des expérimentations et autres exigences de la part des dirigeants politiques du moment.
Les changements en matière d'organisation des filières publiques depuis les fonds de participation, qui restent, quand même, les seuls à avoir lancé les premiers jalons d'une vision éclairée très vite écourtée, en passant par les holdings, les méga-holdings et autres SGP, jusqu'à aboutir aux actuels groupes, ne se sont limités qu'à opérer des restructurations de formes et des changements de périmètres (fusions-absorptions-dissolutions avec ou sans liquidations) des EPE, sans apporter des solutions pratiques aux problèmes du secteur public économique algérien, lors de ses différentes péripéties vers le développement.
Le secteur public marchand affilié aux services de la chefferie du gouvernement du temps des fonds de participation et des holdings voulait affirmer le désengagement de l'Etat en affranchissant les EPE de toute forme de tutelle, par une autonomie d'action soumise aux lois du marché.
Cette option a vite été délaissée par leur rattachement, à partir de 2010, aux différents ministères d'ancrage, consacrant ainsi une remise sous tutelle des ex-SGP et groupes industriels actuels.
L'organisation des filières, mises en place depuis plus de vingt ans, a démontré, en outre, une non-assimilation des fonctions managériales et une absence de vision sur les fonctions stratégiques (fonction industrielle et fonction de participation). L'absence de bilans de réalisation et de fonctionnement des organes de gestion, à ce jour, n'a permis d'évaluer ni les performances ni les contre-performances des ex-SGP et groupes industriels qui leur ont succédé afin de s'assurer de leur bonne gouvernance, de situer les mérites et les responsabilités, et d'identifier les contraintes et autres facteurs dirimants dans l'accomplissement de leurs missions.Il est à reconnaître que dans un contexte de surenchère de réformes, les multiples réformes du secteur public marchand n'ont véritablement jamais obéi à une logique purement industrielle tant les interférences politiques et les choix économiques non judicieux (filialisation, ouverture de capital, prise de participation, restructuration, etc.), éclairés par des théoriciens qui n'ont jamais connu le terrain de la pratique, y étaient la règle (application de «recettes» importées, nominations clientélistes des directoires et dirigeants d'entreprises sans évaluation de profils, suivis d'injonctions administratives et autres ingérences dans la gestion) y sont quasiment omniprésentes, créant en cela un amas d'imperfections, de tâtonnements, d'erreurs de trajectoires et d'incongruités organisationnelles. La gestion des capitaux marchands de l'Etat, confiée à des non initiés, a fini ainsi par subir le coup de grâce en s'amenuisant et en s'anéantissant d'elle-même durant les cinq dernières années, pour rester immobilisée dans l'angle mort du ministère de l'Industrie et des mines.

Constats liés à l'organisation
La situation des filières publiques, en dépit des actions d'assainissement et de restructuration, a accusé le poids des retards dans la réalisation des programmes d'investissements et dans les mutations qualitatives nécessaires au développement de leurs compétitivités. L'absence de plans organisationnels adaptés aux différentes structures d'encadrement des capitaux marchands de l'Etat, tant au niveau central qu'au niveau des groupes, a constitué un frein aux actions planifiées dans les différents plans stratégiques élaborées par des bureaux d'études nationaux et étrangers. Elles connaissent une tendance à la stagnation, si ce n'est une régression pure et simple.
Ainsi, les conséquences de plans organisationnels incomplets proposés aux groupes ont été davantage ressenties comme une contrainte par les personnes responsables de leur mise en ?uvre. Lorsque le plan relatif aux ressources humaines ne correspond pas tout à fait au plan stratégique proposé, chacun doit supporter une charge additionnelle de travail ou de tâches non pertinentes qui vont certainement dévier des objectifs tracés. La situation devient une source de frustration et de stress, car l'organisation n'arrivera pas à aller de l'avant.

Constats liés aux Ressources humaines
Le capital humain a été totalement négligé et les choix des dirigeants n'étaient nullement assis sur la notion de compétence. Beaucoup de cadres de valeur ont été démis de leurs fonctions pour avoir obtempéré à des injonctions non fondées légalement, si ce n'est par pure incompatibilité d'humeur pour être remplacés par des profanes en management, corvéables à merci, ou ayant de piètres résultats à leur actif.
La dimension humaine représente une des plus importantes causes de réussite ou d'échec dans l'implantation de stratégies et de systèmes sains et solides de gestion d'une entreprise. Il est important, par conséquent, d'insister sur le besoin et la nécessité de développer les ressources humaines au sein de ces groupes industriels et leurs filiales suivant une logique de formation et d'évaluation à travers des concours et appels à candidatures, loin de toute désignation clientéliste, sur la base de critères objectifs et de la méritocratie.
Il reste à déplorer quand même une action financée par le ministère de l'Industrie, de la PME et de la Promotion des investissements, qui avait été initiée le 16/09/2010 par la note n°905/SG/10 pour la constitution d'un vivier national de managers, mais dont l'issue n'a jamais vu le jour. Les résultats de cette opération d'évaluation confiée à un bureau d'études algérien, qui avait traité des centaines de candidatures, n'ont jamais été mis à profit, en dépit du budget qui lui a été alloué, sur financement du Trésor public

Constats sur le cadre de la gouvernance
Les contraintes pesantes de l'environnement de l'entreprise publique algérienne constituent à bien des égards des freins à l'éclosion de l'initiative et de l'innovation et sont sources de blocage à son essor et à son développement.
Cet environnement ressenti par tous les gestionnaires du terrain se caractérise plus particulièrement par :
? Un cadre de gouvernance qui mérite d'être repensé en profondeur, aux limites mouvantes, qui rend difficile toute projection de l'entreprise dans l'avenir.
? Une restructuration de l'appareil économique, toujours inachevée, qui a souvent donné naissance à des institutions dont les missions et rôles se sont souvent entremêlés.
? Les restructurations, accompagnées de périodes transitoires qui durent, sont vécues dans un contexte flou qui permet la résurgence des anciens réflexes faits de décisions unilatérales et d'injonctions administratives.
? Des désignations d'administrateurs, n'ayant aucune notion de management des EPE, dont la plupart sont des fonctionnaires n'ayant aucune pratique des fonctions vitales de l'entreprise, entravant par leur présence toute forme de dynamisme et d'initiative dans la gestion libre et autonome des EPE.
? Un climat général délétère et suspicieux très pesant sur la gestion quotidienne, qui freine les initiatives et contraint l'entreprise à opérer des choix optionnels les plus «sécurisants» souvent au détriment d'options plus performantes.
? Le bilan des réalisations des ex-SGP et actuels groupes industriels, en termes de retour d'investissement, n'a jamais été réalisé à titre de suivi périodique et d'évaluation.
Toutes ces contraintes liées à l'environnement ont impacté la dynamique généralement reconnue aux groupes industriels et continuent de peser davantage sur ses performances de gestion.

Contraintes et insuffisances ayant marqué le fonctionnement des groupes
La montée en puissance de la fonction industrielle au sein des nouveaux groupes, suite au passage du modèle SGP au modèle groupe, a été handicapée par le manque d'outils de gestion et des compétences pour les fonctions-clés (développement, exploitation & production, management & ressources humaines).
L'absence de repères et de références (inexistence de standards propres aux groupes), guides de gestion de l'exploitation (ratios de production et de consommation, taux de fiabilité des installations...) et des investissements (exigences standard, modèles types de cahiers des charges et de contrats), donne lieu à des approches disparates entre les diverses EPE affiliées aux différents groupes industriels.
La gestion opérationnelle des participations minoritaires, qui a échappé totalement aux contrôles des groupes industriels et de l'Etat, laissant à ce jour libre cours aux partenaires étrangers de dicter leurs volontés, en maximisant les charges et minimisant les profits pour la partie algérienne. Il y a lieu d'instaurer, à ce titre, une structure centrale au sein des nouveaux groupes industriels ou l'institution d'une agence relevant du ministère des Finances, qui se chargerait de la gestion des participations minoritaires dans les partenariats étrangers et du contrôle des autres participations de l'Etat et autres formes de transactions.
Ces constats de faiblesse sur l'organisation des groupes industriels, qui constitue la preuve éclatante de leur échec, ont été davantage exacerbés par :
? un défaut de vision prospective de la part des managers ;
? un code du travail à moderniser et à assouplir ;
? un contexte réglementaire défavorable marqué par une profusion de textes (procédures de passation des marchés qui restent à flexibiliser, nouveau système financier et comptable, lourd et toujours mal assimilé).

Défis à relever et enseignements sur les échecs
Les filières publiques doivent, promouvoir une vision stratégique «concertée avec tous les acteurs de la sphère économique, tant publics que privés, appuyée par des études d'expertise de «faisabilité» de haute facture, servant de référents aux décisions à prendre dans la reconfiguration du secteur public marchand.
La concertation en intra-filières devrait également dominer la démarche à même de canaliser les efforts, mutualiser et mobiliser leurs ressources, et instaurer une dynamique de compétitivité permettant d'assurer la réussite des schémas à préconiser.
Pour capter les vraies compétences et constituer un vivier en ce sens, il est important de procéder à des concours périodiques pour le recrutement des compétences et de créer une Bourse d'emploi de managers, et de limiter la durée des contrats des cadres dirigeants dans les EPE à un mouvement cyclique de quatre (04) années tournantes, pour éviter l'enracinement des dirigeants, facteur de contre-productivité.
Pour une efficience de fonctionnement et une réactivité de management, il y a lieu de définir des organigrammes-types pour les groupes industriels, quitte à les faire évoluer en fonction de leur envergure et des missions à leur adjoindre. Le suivi des transactions minoritaires, le contrôle opérationnel et la surveillance stratégique doivent être également réhabilités vis-à-vis des filiales et des participations accordées aux partenaires étrangers pour garantir l'exécution de l'ensemble des engagements souscrits et préserver les intérêts publics de l'Etat.
Le tout restant reste tributaire de quatre éléments fondamentaux requis pour créer les conditions de réussite à l'implantation d'une telle stratégie :
? un cadre de gouvernance lisible et transparent ;
? un contrat social fort, avec l'implication de tous les acteurs concernés par la sphère économique ;
? une organisation performante et évolutive ;
? une ressource humaine compétente constamment entretenue par une formation continue et assise sur le seul critère de la méritocratie.
Les acteurs économiques des capitaux marchands de l'Etat doivent acquérir une meilleure compréhension du management, réadapter et évaluer la mise en ?uvre des plans stratégiques déjà élaborés qui leur ont été confiés, et surtout attirer et former les talents qui sauront, à leur tour, relever les défis et endosser leur rôle d'acteur de changement en ces périodes de chocs externes. R. T.

1)- Le terme «dirigeance» est un néologisme emprunté au vocabulaire de la sociologie du travail. Il désigne ce qui touche à la direction d'une organisation. La dirigeance, selon Roland Janvier, chercheur en sciences de l'information (Finistère), est l'art de traduire un projet en cap opérationnel à suivre et en objectif d'actions à atteindre.

Cette contribution, qui se voudrait pragmatique, assise sur les observations d'un praticien du management, loin de toute théorie de salon, ambitionne d'apporter quelques éléments d'analyse, susceptibles d'ouvrir le débat et d'éclairer les prochaines réformes du nouveau département ministériel de l'Industrie et des Mines, qui a commencé, semble-t-il, à faire bouger les lignes.
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