Tébessa est une
ville au climat continental, rigoureux en hiver, avec des températures pouvant
baisser jusqu'à des valeurs négatives, en particulier tôt le matin, durant les
gelées blanches caractéristiques du froid sans égal de cette région à l'Est des
hauts-plateaux.
En cette période de l'année, les gens
adoptent des comportements spécifiques afin de se protéger des morsures
glaciales : parmi ceux-ci, des habitudes culinaires que les habitants de la
région apprécient fortement, donnant parfois l'impression d'un rituel bien
enraciné.
En se rendant au centre-ville dans ces
ruelles grouillantes de passants des deux rives, se dressent des gargotes
exiguës où il est difficile de se frayer un chemin, encore moins d'y trouver
une place. Alors on prend son mal en patience, en attendant que quelqu'un
libère un tabouret. Dans le brouhaha et le bruit sans discontinuer des bols et
des cuillères, les serveurs s'activent à satisfaire les demandes des clients de
plus en plus nombreux. Pendant ces journées hivernales, les lieux ne se
désemplissent pas jusqu'aux premières heures de l'après-midi. Une fois
installé, le maître des lieux s'empresse de prendre votre commande. Ici, le
menu est unique et inchangeable : en premier, le fameux plat si cher à
beaucoup, le «houmess», appelé «hmissa» dans d'autres régions ou «doubara» :
une recette simple, nécessitant quand même un savoir-faire.
La cuisson consiste à faire bouillir des pois
chiche dans de l'eau salée, après les avoir fait macérer quelque temps
auparavant.
Le reste n'est qu'une question de dosage en
ingrédients, concentré de tomate, oignon et piment coupés en fines lamelles ;
et pour relever le goût, le tout arrosé d'huile d'olive et d'un zeste de
harissa.
D'autres préfèrent les haricots blancs
«loubia», préparés dans une sauce bien liée, assaisonnée de quelques épices. En
ces lieux de la bonne bouffe populaire, on trouve de toutes les couches
sociales. Dans les restaurants de fortune, on se rend pour manger vite et à
moindre prix, mais aussi goûter aux plaisirs de ces endroits bien incrustés dans
le décor de la vieille ville.
Certains de ces commerces passent d'une
génération à une autre, perpétuant ainsi des traditions ancestrales, même si
les conditions d'hygiène demeurent loin des normes exigées. Parfois, on vous
conseille d'aller chez X ou Y : c'est lui, paraît-il, qui mijote le mieux ce
genre de cuisine. Une réputation acquise au fil du temps, avec à la clé une
clientèle fidélisée. Les conditions de vie, de plus en plus difficiles,
poussent les gens à fréquenter ces lieux de restauration accessibles à bon
nombre d'entre eux. Ainsi donc, on y voit de tous les âges, le jeune et le
vieux, le fonctionnaire pressé d'en finir le plus vite, l'ouvrier qui a quitté
son chantier le temps de venir savourer son petit-déjeuner, le collégien bien
intimidé, avec son sac en bandoulière, ou encore ce mendiant tapi dans son coin
en train d'avaler un repas chaud, peut-être le seul du jour.
Chaque jour se passe de la sorte une bonne
partie de l'année. Le Tébessi aime se retrouver dans ces endroits, seul ou entre
amis, façon de se retremper dans une chaleur humaine qu'on a tendance à perdre.
Dans la cité de Sidi Ben Saïd, c'est aussi
cette convivialité que les gens préservent jalousement dans leur vécu au
quotidien.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 10/01/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Ali Chabana
Source : www.lequotidien-oran.com