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M. Antonio Panzeri, de la mission d'observation des législatives en Algérie




M. Antonio Panzeri, de la mission d'observation des législatives en Algérie
De retour à Bruxelles, M. Antonio Panzeri, membre de la mission de l'Union européenne d'observation des élections législatives algériennes du 10 mai dernier, accepte de faire le point sur ce qu'il a constaté et ce qu'il pense de ce scrutin.
Liberté : M. Panzeri, vous revenez d'Algérie après avoir participé à la mission d'observation des récentes élections législatives. En quoi consistait exactement cette mission des parlementaires européens '
Antonio Panzeri : La mission des parlementaires européens entrait dans le cadre général de la mission d'observation entreprise par l'Union européenne. C'est une mission très importante qui avait pour but principal de contrôler le déroulement du scrutin, les procédures, les modalités de vote et les résultats des élections.
Mais l'un des éléments essentiels de cette mission d'observation se fondait sur le fichier électoral. Or, vous n'avez pas eu accès à ce fichier'
C'est une question que nous avons soulevée et le chef de la mission européenne a même écrit une lettre à ce sujet mais, franchement, je pense que même les forces politiques algériennes n'ont pas eu la possibilité d'accéder à ce fichier. Néanmoins, il s'agit là, objectivement, d'un problème.
Vous avez, toutefois, eu connaissance du fait qu'en tenant compte des bulletins nuls, 70% des citoyens algériens ont rejeté les partis et 11 millions ont boudé les urnes'
Nous avons pris acte de la déclaration officielle du ministre de l'Intérieur annonçant des chiffres de participation mais il faut maintenant attendre que ces résultats soient entérinés par le Conseil constitutionnel. Il appartiendra ensuite aux forces politiques algériennes et au gouvernement de réfléchir sur la portée des chiffres qui seront avancés par le Conseil constitutionnel.
Mais la Commission nationale de suivi a fait des remarques indiquant que le ministre de l'Intérieur avait divulgué des chiffres alors que l'ensemble du dépouillement était encore en cours dans plusieurs wilayas'
Le ministère de l'Intérieur a fourni des données concernant ce scrutin et il a précisé la distribution des différents sièges. Les chiffres définitifs seront fournis par le Conseil constitutionnel. Nous n'avons pas soulevé de questions particulières à ce propos et nous attendons les précisions du Conseil constitutionnel qui serviront de base pour la composition de la future Assemblée.
La représentation des femmes au sein de cette nouvelle Assemblée sera accrue. Qu'en pensez-vous '
Pour moi, cette présence plus importante des femmes au Parlement algérien est un facteur très positif.
La loi a permis une représentation accrue des femmes et c'est là le résultat d'une volonté de la société algérienne mais aussi d'un v'u de l'Union européenne qui voulait non seulement que cette représentation soit sauvegardée mais augmentée. Il s'agit là d'une donnée électorale très positive et d'une première étape allant dans le bon sens'
Même s'il a fallu avoir recours aux quotas '
Je ne suis pas surpris de la volonté d'imposer un nombre accru de femmes en ayant recours aux quotas car cette question se pose aussi dans les pays européens. Ce n'est pas un problème. Il faut voir cette question dans un autre sens et s'assurer qu'il y ait maintenant un processus continu et à tous les niveaux de la vie politique et de la société algérienne.
Il y a encore 'une exception algérienne' : la vague verte islamiste tant annoncée n'a pas déferlé sur ce pays'
Chaque pays décide des orientations qu'il doit prendre et l'Algérie a choisi la voie de la gradualité et des réformes législatives. Quant aux partis islamiques, je constate que beaucoup de commentateurs ignorent la réalité algérienne car je ne suis pas étonné de l'absence de progression de ces formations politiques pour deux raisons fondamentales.
En premier lieu, les partis islamiques sont intégrés au système politique algérien et, en second lieu, la période de la décennie noire qui s'est abattue sur ce pays a laissé encore des traces très fraîches dans les mémoires des Algériens. Pour ces deux raisons, je ne suis donc pas étonné de ces résultats. Il faut juste comprendre l'Algérie.
Je pense qu'il faudra renforcer les contacts avec les députés algériens de la nouvelle Assemblée mais cette institution a un rôle accru à jouer et il faut que les membres de cette Assemblée aient conscience de l'importance de leur rôle car ils seront chargés des réformes constitutionnelles et il s'agit là d'un rôle éminemment décisif pour mieux faire face à la fois aux attentes de ceux qui ont participé aux élections législatives et aux Algériens qui ont boudé les urnes. J'ajoute deux éléments qui me paraissent importants : le premier a trait à la procédure électorale. Nous avons relevé que ces élections avaient eu lieu dans la tranquillité et la transparence mais si nous prenons, par exemple, la quantité énorme des bulletins de vote, appartenant aux différentes formations politiques, exposés sur les tables, il me semble qu'un travail méthodologique s'impose. Des expériences, tentées dans d'autres pays, pourraient servir d'exemples pour perfectionner le processus électoral. Et, dans le cadre de ce perfectionnement, la campagne électorale pourrait s'ouvrir davantage aux citoyens, aux médias, à la radio, à la télévision et aux journaux.
L'autre aspect sur lequel je voudrais encore insister, c'est le rôle fondamental de cette Assemblée, et ici je fais référence au discours du président de la République à Sétif. C'est un discours très important car la génération au pouvoir va passer le témoin aux plus jeunes, il s'agit là d'un passage important qui doit être interprété par la classe politique. Il faut maintenant continuer la réforme démocratique pour qu'elle se concrétise et réponde aux attentes des Algériens qui ont voté mais aussi à ceux qui n'ont pas participé au scrutin. Le changement doit être effectif et concret. ça ne doit pas être un maquillage. Il ne faut pas prendre exemple sur Lampedusa en disant que 'tout change' alors que rien ne change !
Vous comptez ouvrir des débats au Parlement européen avant d'envoyer le rapport final à Alger '
Lors de la déclaration finale à Alger, nous avons clairement annoncé l'ouverture de débats sur ce rapport final au Parlement européen ainsi que sur les modalités qui permettront de tisser de nouveaux rapports avec la nouvelle Assemblée et ces débats devraient permettre une évaluation plus approfondie de ces dernières élections législatives.
A. M.



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